« Le triathlon ? J’peux pas, j’sais pas crawler ! », ça c’était moi en janvier dernier.
Et pourtant, en ce dimanche 17 avril sur la plage de Bijou Plage à Cannes, engoncée dans ma combi, j’attends le coup de feu pour me lancer sur 1 km de nage dans la mer, un terrain hostile pour moi, la flippée des dents de la mer qui peut passer 1 semaine à la playa sans mettre un doigt de pied dans l’eau. Ce petit km, c’est la 1ère étape du Cannes International Triathlon.
Petit rewind de quelques mois : en février j’apprends que je vais avoir la chance de rejoindre l’équipe Polar pour vivre mon 1er triathlon. Ah mais c’est super ça ! merci trop heureuse ! c’est quoi les distances ?
- 8km de course : Okay ! donc compatible avec ma quasi totale inactivité en CAP depuis novembre
- 52km de vélo : Okay ! je fais 10 min de vélo hollandais par jour pour aller au boulot, ça suffit ?
- 1km de nage : Ah, euh… et ça peut se faire en nage indienne? —
Houston on a un problème : comment faire un tri quand on ne nage que la brasse ou le dos crawlé ? Hors de question de nager en mode enclume sur ce 1er Tri ! C’est là que j’ai décidé de lancer l’opération « Sauvez Willie » : programme de pistoche intensif pour tenter de maîtriser un minimum l’art du crawl.
Oui mais voilà, le crawl c’est technique et 3 petits mois pour l’apprivoiser, c’est pas suffisant…Donc c’est avec les grosses chocottes d’être repêchée par le kayak de l’orga que je me rends sur le départ. J’ai déjà du mal à faire 1km en piscine en m’arrêtant tous les 100m, donc du non-stop sur 1 km c’est la totale inconnue pour moi.
Le départ natation qui m’attend s’appelle en langage Tri «la machine à laver » : c’est la guerre, d’ailleurs on dirait Un Débarquement à l’envers. Ton chrono démarre au coup de feu, pas de borne déclencheuse sur la plage donc les triathlètes sont tous déchaînés pour arriver en tête dans l’eau, quitte à couler le voisin de droite ou flanquer un coup de coude dans celui de gauche. Mais un acolyte de la team Polar me rassure : « T’inquiète Clem, ils ont pensé à tout ! Tu as des plongeurs au fond de l’eau postés sur les 1er 100m qui vérifient que personne ne se noie assommé. » Ahhh, bah super c’est rassurant ça !
SWIM
Top départ c’est parti : j’essaie de lancer mes 1ers mouvements mais ça cogne, et je bois une bonne tasse salée, la 1ère d’une longue série. J’ai du mal à trouver mon souffle mais je tente de me lancer en crawl 2 respirations « vas-y à ton rythme Clem ». Y a pas à dire, ça n’a rien à voir avec de la nage en pistoche : pas d’eau à 26°, plus de petite bande de carrelage bleu pour me guider. Là c’est le trou noir, à chaque plongée sous l’eau je vois des bulles, un bonnet perdu, des bouts de jambes et de bras s’agiter, (« naaan surtout ne pas penser aux dents de la mer Clem… »). Passage de la 1ère bouée, je sais que j’ai fait 200m, « Allez Clem, ça fait 3 mois que tu bouffes du chlore presque tous les jours à t’en déclencher des allergies ,tu vas y arriver ! » Je tente de lever la tête pour bien viser la prochaine bouée mais tout est flou autour de moi, trop de buée dans mes lunettes … Je pense à ce triathlète malvoyant présenté hier à la conf de presse qui va faire tout son tri avec un guide, chapeau… « Tu vois rien Clem ? improvise toi un guide et colle aux jambes de tes voisins ! » Je tente de rester bien parallèle aux autres nageurs, je passe à côté des paddles de l’orga, c’est bon signe, c’est que je dois être dans le parcours.
3ème bouée je suis à la moitié ! Gros bouchon : c’est la guerre pour négocier le virage et je ne me sens pas l’âme d’une guerrière pour ce baptême de nage en mer. Je laisse passer, fais quelques mouvements de brasse avant de relancer en crawl et cette fois en 3 respirations (en vrai crawl quoi…). Enfin : je commence à trouver mes appuis, à bien glisser, je bénis ma combi et l’eau salée qui me font flotter à fond et me permettent de retrouver les mêmes bonnes sensations qu’avec mon pull-boy. Je commence à sentir les épaules qui chauffent, mais je suis bien lancée, en fait, je m’éclate ! J’ai la 4ème bouée en vue – plus que 200m ! – Je m’étonne de voir encore autant de nageurs à mon niveau, moi qui pensais terminer dans les dernières, avec les paddles de l’orga ! Et ce bruit de fond ?… le speech de l’animateur au micro…Non déjà ?! Plus je l’entends se rapprocher plus j’ai envie d’exploser de joie. La tête sous l’eau, le fond s’éclaircit, le sable apparaît… « ça y est, t’es arrivée Clem, plus que quelques mètres ! ».
Je repense aux bons conseils de Lorenza de la team Polar : « ne nage pas jusqu’au bout, relève toi quand tu as pieds et marche dans l’eau pour retrouver ton équilibre et éviter la tête qui tourne. Je regarde ma montre : 22’56 minutes. Mais c’est pas possible !! Moi qui fais dans mes beaux jours 1 km en 27 minutes et avec une bonne partie en palmes . Je redoute même d’avoir coupé le parcours mais ma Polar m’indique bien 1k100, je n’en reviens toujours pas !
Je sors de l’eau avec un sourire béat, j’ai envie d’arrêter les triathlètes qui m’entourent : « les gars, je l’ai fait, j’ai fait mon km en mer et 100% en crawl ! »
En fait, la course aurait pu s’arrêter là pour moi, j’étais déjà comblée par mon challenge natation qui avait occupé 95% de ma prépa (quand on nage comme une loutre à l’arrêt, il faut ce qu’il faut..).
Et pourtant, j’avais encore une belle partie de plaisir qui m’attendait : une balade en vélo dans les hauteurs de Cannes avec ma fusée en prêt, le Lapierre Xelius. Depuis mon essai d’hier avec la bête en carbone de 7kg, je trépignais à l’idée de l’apprivoiser.
En zone de transition, je suis tellement à l’ouest aux pays des bisounours que je passe devant mon sac de vélo sans le voir. Je pars dans une lutte avec ma combi pour tenter de l’enlever. A faire avant les prochains : s’entraîner à enlever sa combi en mode warrior. Là je sens qu’à part faire marrer mon voisin de transition, c’est pas très efficace. Hop, hop, hop, j’enfile mon casque, mes lunettes, et je demande gentiment à une bénévole de me mettre de la crème solaire. « Allo ? Clem… tu veux une caïpirinha aussi ? t’es en transition là, file !« .
BIKE
Je saute dans mes baskets de running en zappant les chaussettes. Pas de pédales automatiques pour moi suite à un bel acte manqué de blonde : j’ai amené mes chaussures de vélo mais sans mes pédales. Et des chaussures de vélo sans tes pédales c’est un peu comme une guitare sans corde : tu fais pas grand chose avec… Je sors de la zone de transition, manque de tomber en courant à côté de mon vélo et tente d’enfourcher ma monture avant d’entendre un bénévole me hurler « Noooon, après la ligne bleue ! ». Et oui le Tri ça rigole pas, tu as des règles strictes et des pénalités si elles ne sont pas respectées. Tu pédales trop proche de ton voisin de droite ? Drafting interdit= 5 minutes en prison ! ». Tu enlèves ton casque à vélo avant d’avoir déposé sont vélo ? pénalité !
Je trouve les 15 1ers km sur la sortie de Cannes super longs, je me fais doubler non-stop. J’ai du mal à trouver mon allure, mais surtout à bien maîtriser les vitesses de ma fusée Lapierre (les vitesses électriques, mais quel pied !). Il faut dire que je suis un peu là en touriste quand même… 3 semaines avant j’enfourchais pour la 1ère fois un vélo de route et je n’ai que 3 sorties de 30 km au compteur.
Sur la 1ère petite montée au 17ème km, c’est là que tout commence… Je retrouve Olivier, Nadia, François sur le parcours, quel plaisir de retrouver des têtes connues, ça booste ! Fred de l’équipe Polar me double. « Allez Clem, accroche le, lance-toi ! » Moi qui peinais à suivre sur le plat, je grimpe, et je sens que je grimpe plus facilement que mes voisins, mais… je double en plus, c’est grisant ! Je n’ai pas grand chose dans les cuisses mais mon « petit gabarit » me donne l’avantage dans les montées… En sortie je gère mal mes vitesses pour la reprise et me refait doubler. 2ème montée, rebelotte : tête dans le guidon, je donne tout sur mes coups de pédales, le cardio monte, je retrouve mon souffle de vache asthmatique de mes séances de piste qui me manquent tant, et je double, Youhou ! j’aaaaaaime les montées ! Mais je perds toutes mes places dans les descentes : il flotte, ça glisse et j’ai pas envie de mourir aujourd’hui. J’ai vu 3 belles chutes sur le parcours, dont une vraiment moche donc les descentes, c’est au frein ! A ce moment je ne sais pas encore que Nadia de la team Polar terminera à l’hôpital avec une bonne tripotée d’athlètes blessés.
Je ne vois pas passer la fin du parcours, je suis en train de découvrir les plaisirs du vélo… je pense à Amo, mon Homme, tellement hâte de partager ça avec lui sur mon prochain tri à Versailles. A partir du 30ème km c’est le déluge. Je pédale sous la flotte avec deux Spontex au pieds : à chaque coup de pédale je sens mes baskets se vider. « Donnez moi du Paic et je vous nettoie la chaussée à coups de pédale… ».
Les endorphines montent, la rage aussi, je pédale sec en pensant à tous mes rendez-vous manqués depuis novembre : « tiens ça c’est pour le Marathon Nice Cannes raté, et ça pour ma Saintélyon loupé, et prends ça pour le Marathon de Paris… », enfin, j’ai la niaque ! Top, sauf qu’on est au 50ème km.. Je suis vite coupée dans mon élan à la vue à l’approche de la zone de transition.
Ah non, pas là, au moment ou je commençais vraiment à m’éclater ! Je lâche à contrecœur ma fusée Lapierre et pars vers la transition vélo-course après 1h51 de course. Le temps de lâcher mon casque et mes lunettes et je repars pour cette dernière partie que je redoute. Je me lance en courant sur des œufs, j’ai la trouille de sentir ce point de douleur qui me saoule depuis plusieurs mois.
RUN
Le parcours de 8km (enfin 9,2 à ma montre) se fait sur 2 aller-retours sur la croisette. Je tente de courir sans trop forcer, c’est frustrant, ça m’énerve, et puis j’aime pas les parcours en boucle !
Et là, qui vois-je arriver à contre-sens : David Hauss, champion d’Europe de Triathlon, qui termine son L en relais (20KM de course), et avec qui nous avions fait un test de combi en mer la veille. Mais j’aiiiiime trop les parcours en boucle ! Quelle foulée…Comme dirait ma mère « ça donne envie de se mettre au Tri ! »
C’est quand même beau ces sports ou tu prends le même départ que les champions, ou tu cours dans leur trace ! Je tente un « Allez David ! » et j’entends un « Allez Clem ! ». Non, ne rêvez pas c’est pas David… mais Fred de la team Polar qui m’encourage en sens inverse, suivi de près par Elodie qui me lancera à notre 2ème croisement « Rejoins-moi et on finit ensemble ! »… Super idée mais t’es loin ma belle ! Et si c’était possible… Je tente de la rattraper mais mes jambes pèsent 1 tonne. Je sens une tape dans le dos : mais…c’est David Hauss qui me fait un Poke d’encouragement en me dépassant comme une flèche. Ouhhh, ça booste ! Je rattrape Elodie 600 m avant de passer l’arche, main dans la main et tellement HEU-REUSE !
Je me fous de mon temps qui ne me dit d’ailleurs pas grand chose, je veux juste savourer, retrouver la team Polar pour partager cette 1ère médaille de Triathlon. Je l’ai fait ! Enfin, une victoire après ces mois de déception à ronger mon frein, la 1ère depuis… depuis septembre sur mon dernier Paris-Versailles, ça m’avait tellement manqué ! Je suis sur un nuage, le même que celui de mon 1er marathon. Je commence à voir trouble, je me planque pour cacher mes larmes, mais quelle découverte ce Tri. Je n’ai qu’une envie : recommencer !
Enorme merci à Bernascom et Polar pour ce week-end d’exception, à Cyril pour ces précieux conseils, à ma V800, un partenaire de choc super motivant pour mes séances pistoche. Je n’aurais pas pu rêver mieux pour ce 1er triathlon, tout était parfait et j’ai vraiment cherché à savourer chaque moment de ce week-end découverte. C’était une super aventure humaine et sportive ! Une semaine après, je suis encore aux anges… Spéciale merci à tous les membres de la joyeuse équipe : c’était un plaisir de partager ça avec vous tous ! Guillaume, Gérald, Géraldine, Nadia, Charles, François, Olivier, Fred, Samuel, Steven, Sonia, Seb, Delphine, Maud, Franck….
Photos : Trimax Magazine.
Merci à François pr la photo de couv et Charles pour la vidéo !
Le triathlon de Cannes est à retrouver ici :
by Charles : http://www.charlesbrumauld.com/le-polar-triathlon-de-cannes-vu-par-charly/
by Stéven : http://www.stevenlehyaric.net/#!Polar-Cannes-International-Triathlon-Question-pour-unTriathlon-/c112t/572633850cf269c350f53b21
by Sonia : http://www.leschroniquesdesonia.com/archive/2016/04/18/j-ai-teste-pour-toi-le-triathlon-international-de-cannes-ave-5790349.html
by Delphine : http://www.ohmytri.fr/oh-my-actu/oh-my-tri-a-cannes-17-04-2016/
by Franck http://www.outdoorheroes.fr/cannes-international-triathlon-format-l/
by Géraldine : http://www.run-chic.fr/