La journée avait pourtant mal commencé : perdue dans mes pensées de course, j’étais grimpée dans mon train sans rien composter… Pas de bol, Dimanche à 8h, ils étaient là ! « Aucun souci c’est de ma faute je vous donne tout ce que vous voulez mais on fait ça vite parce que j’ai un Semi à courir OK ? » Et qui tombe sur THE contrôleur RATP né dans une famille de coureurs? C’est Bibi ! J’ai eu droit au palmarès des frères et soeurs, de ses encouragements et suis repartie sans ticket mais sans prune ! Si ça c’est pas un signe qui présage une belle journée …
Aujourd’hui, j’épingle mon 1er dossard depuis les 20km de Paris, bon hors Saintélyon en relais et hors Cross : disons que c’est la 1ère course avec un objectif de chrono. Et depuis ma dernière grosse claque aux Championnats Régionaux de Cross, ces dernières semaines j’avais quelques doutes en mes capacités à « lâcher les chevaux » et faire moins d’1h34, voir 1h33 sur cette course. Ca fait maintenant 3 jours que j’ai l’effet « montagnes russes » dans le ventre, et je le connais celui-là : c’est un bon stress qui se transforme en énergie positive le moment voulu. Je trépigne de me retrouver sur la ligne de départ, d’autant plus que j’ai droit à mon SAS préférentiel pour mon 1er semi.
Arrivée au Parc Floral c’est déjà la course : je file retrouver mes copains d’entraînements pour la photo de mon Club Free Runners. J’en profite pour enfin faire connaissance avec Guillaume et découvrir qui se cache derrière la basket rouge Londsrunner (un très bon coureur qui bouclera son Semi en 1h18’26)! A peine le temps de s’encourager, je cours au Village Entreprises pour faire une autre photo avec ma boîte pour laquelle je cours. Puis je vole de nouveau rejoindre la ligne de départ. Avec tous ces allers-retours au moins j’ai fait mes échauffements ! Et c’est tant mieux parce que c’est pas dans le Sas Préférentiel que j’aurais pu les faire : on se croirait sur la Ligne 13 aux heures de pointe ! Si je tente de lever le bras j’assomme mon voisin de droite et si je lève le genou je castre celui de gauche. Bon on oublie les gammes pour s’échauffer et on reste droit comme un « I » en travaillant sa respiration hein…
10h : Top départ des Elites, les Kenyans et les Champions s’élancent ! 1 minute plus tard, c’est à nous !
Semi-Marathon Round I : 14,2 km/h
1ère partie du parcours : youhou ! Ca déroule, je m’élance plus vite que prévu et tiens bien sur toute la 1ère partie de course, avec un RP (Record Perso) à 42’21 au 10ème km. Je me surprends et me dis qu’à ce trend finalement le « 1h30″ n’est pas si injouable que ça, je m’accroche à…. bah à moi car je n’ai pas trouvé de lièvre à mon rythme ! Et oui c’est ça de partir en Sas Préférentiel : pour y entrer tu dois montrer patte blanche et justifier d’un temps potentiel sur Semi de moins d’1h35 pour les Femmes et 1h25 pour les Hommes. Du coup tu te fais bien aspirer sur le départ mais aussi pas mal doubler tout au long du parcours par des hordes d’hommes déchainés…
Vers le KM4 : j’aperçois un « Kenyan » assis sur le bas-côté, tout penaud, la tête entre les genoux, et à ses côtés un homme la main sur l’épaule… Je ne peux m’empêcher de penser à cette photo crève-cœur de Paula Radcliffe effondrée, en pleurs, sur le trottoir suite à son abandon sur le Marathon d’Athènes. Dure dure la vie de champions…Il devait avoir une sacré pression sur le dos, et moi je suis là pour le fun, alors cours Clémence, enjoy ! Ray, Free Runneuse et aiguilleuse bénévole, sera d’ailleurs là pour me le rappeler avec ces supers encouragements au 5ème km.
KM8 : passage vers Rue de Rivoli, toujours au top, les ailerons sont sortis, je me sens calée au niveau de ma foulée, les gestes sont fluides, je suis bien, je plane, je divague même… Pfff c’est beau Paris quand même, j’aime courir, j’aime le printemps, je vous aime tous, vous les spectateurs supporters, et même toi le runner qui passe ton temps à me doubler puis ralentir pour me redoubler en te mettant bien juste devant moi !
KM9 : Je ralentis un peu, un gentil Monsieur me double et me lance avec un so cute accent british : « je vous ai souivi depouis le débout, buavo pour la foulée, à mon tour de vous aider » et m’ouvre le chemin. Je me cale dans ses pas, il me tend même sa bouteille d’eau, c’est beau ces gestes d’entreaide entre coureurs ! Il accélère son allure, voit que je peine à le suivre et part en me souhaitant une « touai bonne course », quel Gentleman ! Allez Hugh Grant, appelle moi « Mademoiselle » et je serai comblée…
KM10 : le kilomètre ou tout bascule….
Semi-Marathon Round II : 13,2 km/h.
[Et Vlan : 1km/h en moins…]
Je regarde ma montre : 42’21, soit 10′ de moins que mon dernier 10km, c’est bien ! Mais c’est louche non ?…et BAM, quasi pile à la borne 10KM un bon poing de côté me rappelle à l’ordre : « Alors on s’est emballé ma p’tite dame ? On s’est pris pour Paula Radcliffe ? »… Aahhh foutu poing de côté qui me fera perdre 50′ sur 3 bonnes minutes ! Je vois l’infime possibilité de faire 1h30 s’envoler. Poing sur le ventre, penchée en avant, un pompier coureur me repère et me crie en me doublant « faut rien lâcher ça va passer, serre les poings! ». Mais oui c’est vrai ça, la méthode du serrage de point : et bien ça marche ! Au bout de quelques -longues- secondes je me redresse,et arrive à repartir à 4’30 du km. Sur le parcours, des surprises m’attendent : j’ai droit aux encouragements de Jérôme nouveau copain d’entraînement qui prépare l’Ecotrail 80km, et vers le 12ème km de Valéry avec lequel j’ai couru ma dernière sortie d’avant Semi quelques jours avant.
KM14 : le rythme est relancé mais pas pour longtemps, du 14ème au 16ème km la montée de l’Avenue Gravelle m’attend. Un Free Runners inconnu me reconnait à mon T-shirt et m’encourage en me doublant, je m’y accroche le temps de passer l’Avenue. Non mais quelle idée de planter une montée sur le dernier quart de Semi ?! Et le tracé inversé du Semi de cette année est censé être plus fastoche ?…Mmouais, je demande à voir.
KM16 : Enfin, on se rapproche du Bois de Vincennes, on le longe, on le longe, et… on le longe encore. Ça me semble interminable… A la sortie du dernier ravito, je croise Caren Laure, coach FR qui me voit peiner à boire et me conseille de m’asperger. Mon rythme s’est bien ralenti, je préfère ne plus regarder ma montre qui me donne des allures instantanées à 4’45 quand je devrais être à 4’20. Un coureur se met à mon niveau, un peu dans les vapes je mets du temps à le reconnaître mais… mais c’est Jérôme ! (un autre Jérôme..). Mon voisin runner ! C’est fou de réussir à se retrouver parmi 40 000 coureurs ! D’autant plus fou que Jérôme a un sacré niveau et doit généralement boucler ses Semi en 1h20. Il m’explique qu’il a été freiné dès le début de course à cause d’un bon croche-patte, a faillit abandonner mais a décidé de terminer « à la cool » (il terminera en 1’29 et des brouettes…). Mmmmm Jérôme tu parles le langages des signes ? Parce que là je suis dans le rouge et incapable d’aligner 3 mots pour te répondre. Il me propose de terminer avec moi mais je lui dis de filer, je n’aime pas l’idée de retarder quelqu’un… Mais le croiser me boostera pour les derniers km. « Allez, courage plus que 4km ! » Agghhhh justement, 4km cuite c’est long !
Je cherche des pensées positives auxquelles me raccrocher : euh…mes enfants ? Allez on tente ! Mais mon esprit part direct sur le goûter d’annif avec 12 kids en furie qui m’attend samedi prochain… Wowowo, on a dit des pensées qui boostent pas qui achèvent ! Je pense à Elena qui doit être en plein Semi de Rambouillet, Emma championne qui a bouclé son dernier Semi en 1h29 (mais comment elle fait ???), Anaïs qui m’a aidé à m’accrocher à la CAP et qui, blessée en 2014, n’avait pas pu courir ce Semi. Je pense aux copains blessés qui ont du fait une croix sur ce Semi. Je pense au jour ou moi aussi, touchée par une blessure de course, je devrai renoncer la mort dans l’âme à un dossard. Et là j’ai la chance d’être debout et à 2 pieds de mon Finish, alors Go go go !!! Je relance.
KM18 : Ah, enfin on s’engouffre dans le bois ! je crois que c’est à ce moment là que j’entends Marie Prioux Coach en chef free runners me prodiguer ses bons conseils : « Respire, serre toi de tes bras ! » Jusqu’à la fin je tente de me concentrer sur la coordination de mes gestes, sur ma respiration. Comme sur les derniers km du Marathon de paris, je suis frappée par l’ambiance des derniers km : pas un coureur ne parle, les souffles se font plus forts, j’en entends un qui peine et qui donne tout derrière moi (d’habitude c’est moi qui suis dans cet état!). C’est dingue, c’est la 1ère course ou je ne suis pas freinée par mon souffle coupé ! Comme quoi : comprendre enfin comment bien respirer lors de ma prépa Marathon m’a bien aidé. Par contre ça pique fort côté mollets et fessiers, cette fois-ci ce sont mes jambes qui me ralentissent.
KM 19 : Allez plus que 2 km, lève moi ces foutues jambes Clémence !!! J’ai 500 m difficiles, à la traîne avant le 20ème mais une fois le dernier virage passé, la vue au loin de l’arche me donne un bon coup de fouet ! Avant l’arrivée j’ai généralement du mal à accélérer car je suis toujours à bout de souffle. Mais là, je me régale d’une bonne accélération sur les 500 derniers mètres, avant de passer heureuse la ligne d’arrivée ! Je n’ai pas regardé mon chrono depuis le 10ème km, juste mon allure et vue les dernières que j’ai vue passer je craignais mon chrono final…
KM21,1 : Je pose un coup d’oeil furtif sur ma montre qui m’indique 1h32 et 7 sec. Sur le coup je ne sais pas trop quoi en penser, j’avais 1h34 en objectif de début de course mais ai pensé fort à 1h30 durant la course… Accolade dans le sas d’arrivée avec Dominique Chauvelier coach de mes 20KMParis en annonçant mon temps, je continue à avancer vers le ravito, y retrouve cassée mais heureuse Jérôme qui m’annonce son super temps d’1h29 malgré sa patte blessée, puis croise Greg avec qui j’ai couru la Saintélyon relais, qui courait en meneur d’allure personnel avec Antoine en 1h28. Ouawou, bravo à vous !
Avant de récupérer ma médaille, tape dans le dos de 3 coureurs, un certain « Franck » et 2 de ses copains sprinteurs qui étaient derrière moi sur la fin de course « on est resté dans votre foulée, beau rythme! ». Merci à vous, ça fait vraiment plaisir d’entendre ça ! A défaut d’avoir trouvé un lièvre auquel m’accrocher j’en ai moi même été un sur quelques kilomètres…
Je savoure cet instant après la tempête, mais tente de trouver des t-shirts rouges dans la foule pour partager cette course. Je retrouve Adrien, coach free runners (et oui encore un !) qui a bouclé son Semi en 1h13 ! Alexis, Fred puis Ivan ! copains d’entraînements avec lesquels j’aurais pu-dû courir au même rythme. Mais ma « condition de Femme » me permettant d’accéder au SAS préférentiel j’étais partie seule… Je retrouve aussi Laetitia, qui cette fois-ci a vécu le Semi en tant que bénévole « et oui il faut rendre de temps en temps« . C’est vrai Lætitia, tu as raison, il faudrait que j’y pense un jour…
Déjà le temps pour moi de quitter l’ambiance euphorique de ce Semi pour rentrer…
Pourquoi ce semi-marathon était top :
Au delà de la météo de dingue, c’est quand même génial de se faire encourager tout au long du parcours par des coachs et copains de ton Club ou des inconnus, ce sont vraiment des conditions exceptionnelles, chaque encouragement me booste, je m’y accroche, encore plus efficace qu’un gel pour moi…
Maintenant, focus sur la véritable échéance dans 1 mois : le Marathon de Paris ! Et dire que je n’ai fait que la moitié… Ahhhh ne pas y penser ! D’ici là, je vais tenter d’apprendre à boire en courant… Là je suis juste bonne à mettre la moitié à côté ou à m’étouffer…Et surtout récupérer : à J+1, j’ai mal PARTOUT !!!
Bravo à tous ceux qui ont couru ce Semi, bonne récup’ et plein de bonnes ondes pour les blessés ! Revenez-nous vite !
Le détail de ma course :
La vidéo du semi avec l’équipe Free runners, merci Sébastien ! :